Je vais faire mon rabat-joie : même si je suis d'accord sur le principe que le monopole des pharmacies doit être préservé, je trouve que ce slogan est douteux. Les pharmaciens savent-ils ce qu'il y a dans les médocs qu'ils vendent ?
Vu le nombre de scandales sanitaires liés aux médicaments ces derniers mois (mediator, pilules), et sachant qu'il y en a probablement d'autres à venir (traitements contre le cholestérol et contre le cancer, notamment), c'est peut-être une mauvaise idée d'afficher un tel truc dans une officine.
Arrêtons de boire à gros goulot la (dés)information journalistique.
On peut débattre de ces problèmes pendant des heures, mais je vais essayer de faire court.
TOUS LES "PROBLEMES" QUE L'ON SEMBLE DECOUVRIR AUJOURD'HUI SONT CONNUS DEPUIS LA MISE SUR LE MARCHE DE CES MEDICAMENTS.
1) MEDIATOR
C'est un ANTIDIABETIQUE. Il n'aurait dû être prescrit que dans cette indication. Or, un de ces effets secondaires est la perte de poids (ce qui est au demeurant très intéressant pour les diabétiques). Problème, nombre de personnes l'ont utilisé à tort UNIQUEMENT dans ce dernier but - et nombre de médecins, sous la pression des patients, l'ont prescrit ainsi. Donc non conformité à l'AMM du produit et à ses règles de prescription. Normal qu'il y ait des retours de bâtons.
Quant au problèmes des valvulopathies "induites", c'est extrêmement compliqué. Et c'est en partie ce qui explique le gros imbroglio des indemnisations... En 2 mots, les diabétiques ont une prédisposition aux valvulopathies. Si 10 ans après le traitement, il y un souci de ce type, est-ce à cause du médicament ou est-ce une évolution de la maladie sous-jacente. Comme personne n'a à l'époque cherché ces valvulopathies avant la mise en place du traitement, on ne saura jamais. Et les experts sont contradictoires sur le sujet.
2) LES PILULES
Ce qu'on entend sur les ondes aujourd'hui est la plus grande escroquerie pour détourner le grand public des choses plus terre à terre qu'on ait vu depuis longtemps.
Les problèmes cardiovasculaires des pilules sont connus, indiqués et précisés sur les notices, le VIDAL et toute les documentations médicales depuis leur mise sur le marché. Il est d'ailleurs nécessaire quand on est sous pilule :
- de faire un contrôle sanguin des facteurs de risques (cholestérol, triglycérides, etc) 1 à 2 fois par an (et plus si paramètres anormaux)
- d'ARRETER DE FUMER
J'ai 120 étudiants en cours à l'hosto dont 80% de filles. Forcément, elle m'ont demandé des précisions sur "l'affaire" des pilules. La question est simple : je leur ai demandé 1) combien faisaient leurs contrôles sanguins et 2) combien parmi les fumeuses avaient arrêtées. J'ai eu 4 réponses à la question 1 et ZERO à la 2... Et chez des PROFESSIONNELS de SANTE. Alors dans le grand public !!!
Pour la DIANE 35, c'est encore plus flagrant. CE N'EST PAS et N'A JAMAIS ETE une pilule contraceptive !!!!!! Là aussi, clairement indiqué dans la notice. C'est un anti-acnéique pour la femme jeune. L'aspect contraception est abordé dans ... les effets indésirables ("attention, ce médicament bloque l'ovulation et a donc un effet contraceptif"). Les problèmes cardio-vasculaires sont clairement indiqués avec la nécessité d'arrêter de fumer.... CQFD
A titre inficatif, le risque relatif d'évènements thrombo-emboliques est de +0,02% avec les pilules de 1ère et 2e génération, + 0,03 à 0,04% avec les 3e et 4e.... et +0,06 en cas de grossesse par exemple!!! Donc certes, les journaleux avides de scoop et de saignant vous disent : "le risque avec une pilule de 3e génération est DOUBLE par rapport à une 2e"... Le double, c'est passer de 0,02 à 0,04% donc au final, pas grand chose.
Corollaire : on voit déjà la hausse de délivrance des pilules du lendemain (beaucoup plus dosées donc beaucoup plus dangereuses) parce que les filles arrêtent leurs pilules classiques et hop, accident. Et mon épouse qui bosse à l’hôpital en maternité remarque également (mais c'est aussi sociétal) une hausse des IVG assez effrayante...
Tempête dans un verre d'eau !
3) ANTICHOLESTEROLEMIANTS
2 mots : il est bizarre qu'un vieux prof à la retraite (en fait 2, avec Debré) qui sont aux oubliettes depuis des années sortent un bouquin (tiens, ça fait parler d'eux) d'un coup, comme ça. Comme ils n'exercent plus, ils ne risquen pas grand chose. Par contre, 90% des cardiologues de France et de Navarre montent au créneau contre ces c.... Les hypocholéstérolémiants, c'est INDISPENSABLE en post infart ou en cas de facteurs de risque (comme la ceinture : on parle des morts à cause de la ceinture mais jamais des vies sauvées).
4) LES ANTI-CANCEREUX
Trop long pour en parler, d'autant que c'est mon domaine. Mais bon, les progrès réalisés dans les dernières années (thérapies ciblées) sont hallucinants et extrêmement prometteurs dans les 10-15 prochaines années... Merci qui ???
Bref, le circuit du médicament en France est un des plus sécurisé (si ce n'est le plus) au monde. C'est bien pour ça que les instances ordinales se battent contre la vente sur le net (même si celle ci est adossée à une pharma comme la loi le prévoit).
Par contre, il est GRAND TEMPS que les gens se prennent en main et comprennent que le médicament n'est PAS ANODIN et ne s'achète (pour ne pas dire ne se consomme) pas comme un yaourt ou une lessive.
A contre-courant avec ce qu'on a vu se développer en quelques années (sites de vulgarisation, vidal des familles, commandes sur le net puis peut être grande distrib). Il y a de ce fait une trop grande pression du public qui parfois croît tout savoir mieux que tout le monde et fait l'ordonnance à la place du médecin, qui pour ne pas froisser son patient dit parfois "amen" et signe.
Tout médicament, même le plus banal (paracétamol) a des effets secondaires et peut être dangereux.
On semble le redécouvrir avec les pilules. Finalement, ça peut être un point positif...
Bon, allez, stop.... Je me sauve. Je vais aller récolter des tomates pour les vendre enter deux boites d'aspirine.