Quarante-huit heures après l'embuscade qui a coûté la vie à dix soldats français en Afghanistan, lundi 18 août, on commence à connaître les dessous de ce véritable piège de feu dans lequel les militaires ont été pris pendant plus de six heures. Certains blessés du 8e Régiment de parachutistes d'infanterie de marine (RPIMa), qui a subi l'essentiel des pertes, ont tenu à souligner le comportement "héroïque" de leur camarade légionnaire du 2e Régiment étranger de parachutistes (REP) mort au combat. Le caporal-chef Penon, âgé d'une trentaine d'années, était auxiliaire-sanitaire. Versé par l'état-major dans cette unité du 8e RPIMa, il faisait office d'"aîné" auprès des jeunes avec lesquels il patrouillait.
Lundi 18 août, vers 13 heures 30, lorsque la section descend des véhicules blindés au pied du col qui sépare les provinces de Kaboul et de Kapisa, il prend sa place dans la colonne d'une trentaine de soldats qui part en reconnaissance. Quelques hommes restent auprès des véhicules. Les tirs ont débuté alors qu'ils avaient parcouru près de six cents mètres dans ce qui ressemble à une cuvette en fer à cheval. Alors qu'elle n'était plus qu'à une cinquantaine de mètres du col, la section s'est alors éparpillée pour trouver un abri, souvent derrière un simple rocher.
Dans le même temps, des tirs de roquettes et de fusils visent le reste de la troupe restée près des véhicules. Le traquenard est parfait : les soldats, pris sous un feu nourri, ne peuvent ni avancer, ni reculer. Les renforts, arrivés une heure et demie après le début des combats, n'accéderont au front qu'au bout de quatre heures.
Selon certains blessés français, le caporal-chef Penon fut l'un des rares à braver "le déluge de feu" qui s'est abattu sur les militaires français. Il s'est porté au secours d'un premier blessé, qu'il a déposé dans une zone située plus bas et protégée des tirs. Puis il est remonté au cœur de l'affrontement. Lors de sa première descente ou en remontant, il a été touché d'une balle dans la cuisse. Pourtant, sous les yeux de ses jeunes camarades, il s'est de nouveau porté au secours des autres blessés. Il aurait, selon certains témoignages, secouru un autre blessé avant d'être touché mortellement.
Le caporal-chef, membre du 2e REP, basé à Calvi (Haute-Corse), avait déjà connu d'autres théâtres d'opérations. Selon ses supérieurs, il avait servi en Afrique et en ex-Yougoslavie. "Son corps sera inhumé à Calvi, son comportement honore notre régiment", commentait-on sobrement, jeudi matin, à Calvi.
Le chef de corps et une compagnie d'honneur du 2e REP de soixante-dix hommes devaient assister, jeudi, aux Invalides, à Paris, à l'hommage aux victimes. "Cet infirmier a eu une attitude exemplaire", a-t-on confirmé, jeudi matin, à l'état-major des armées.