Renault mise sur les ingénieurs des pays émergents

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Lion Hors catégorie
4 Août 2005
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Qui aurait pu croire que la Logan, la voiture à bas coûts de Renault, conçue au Technocentre de Guyancourt, modifierait en profondeur l'organisation du constructeur français ? Avec 1 million d'exemplaires vendus en moins de quatre ans, la Logan tire les ventes du constructeur à l'international. Il table sur 700 000 voitures en 2008.
De fait, dix ans après avoir racheté le constructeur roumain Dacia, la Roumanie est devenue bien plus qu'une usine à fabriquer des voitures à moindre coût. En 2007, Renault y a installé un centre d'ingénierie : Renault Technologie Roumanie (RTR) compte 2 000 ingénieurs contre 500 à l'ouverture. Demain, ils seront 3 000. Pour faire face à cette montée en puissance, Renault a dû signer des partenariats avec des universités roumaines afin de mettre en place des cursus spécialisés.
Au fil du temps, "RTR devient une pièce très importante de notre dispositif", reconnaît son directeur, Philippe Prével. A l'horizon 2009, la Roumanie devrait être le deuxième en ordre d'importance des centres d'ingénierie chargés de s'occuper des dérivés de la Logan.
L'étude de sa remplaçante sera réalisée en Roumanie et, pour la première fois dans l'histoire du constructeur, la "vie série" d'un véhicule (en l'occurrence la Logan), c'est-à-dire la phase qui accompagne l'évolution du véhicule pendant toute sa vie commerciale, jusqu'à son remplacement, a été localisée chez RTR.
Pour le nouveau modèle Sandero de la famille Logan, qui vient d'être lancé en Europe, seule la première vague de prototypes a été réalisée au Technocentre de Guyancourt. Toutes les autres ont été effectuées à Pitesti, diminuant les délais de conception et les coûts.
L'"offensive produit" lancée par Carlos Ghosn dans le cadre de son plan Renault Contrat 2009 conduit RTR à travailler sur d'autres modèles. "Nous avons travaillé pour le 4 × 4 Koelos, la future Mégane. Aujourd'hui, nous travaillons sur de nouveaux projets, nous avons la responsabilité d'une variante de la Kangoo", affirme Christian Estève, président du conseil d'administration de Dacia et responsable du groupe pour la région Euromed.
Autre exemple de la montée en puissance de la Roumanie : un centre d'essai doit être installé à Titu, et l'usine de Pitesti doit réaliser dès cette année un tiers des "crash test" (150 sur 450) de la gamme Renault. Là aussi, la logique est financière : il faut compter 18 000 euros pour réaliser un crash test en France et seulement 6 000 euros en Roumanie.
Chez Renault, on invoque tout simplement le pragmatisme. "Il y a quelques années, Renault réalisait encore 90 % de ses ventes en Europe occidentale. Aujourd'hui, la croissance se fait dans les pays émergents, constate Jean-Louis Ricaud, directeur général adjoint ingénierie et qualité de Renault. L'ingénierie doit se localiser là où sont les clients et les fournisseurs. Ce n'est plus au Technocentre que l'on dessinera les pièces des véhicules qui seront vendus en Inde ou en Europe de l'Est."
Après le Brésil et la Corée, c'est dans cette logique qu'un centre d'ingénierie doit ouvrir en Inde, où Renault veut lancer sa voiture à 2 500 euros avec son partenaire Bajaj. Le constructeur automobile a bien compris qu'il n'était pas sain qu'à moyen terme les voitures destinées aux pays émergents soient conçues en France. "Il doit y avoir un équilibre entre délocalisation de la production et développement des véhicules", souligne-t-on au Technocentre.
En France, les salariés du Technocentre de Guyancourt et des autres centres d'ingénierie craignent de se transformer en une simple tour de contrôle chargée de surveiller ailleurs le bon déroulement des opérations. "Nous sommes devenus des pigeons voyageurs", dit un salarié.
Pour M. Ricaud, les salariés "n'ont pas raison d'avoir peur. En 2012, un tiers de notre ingénierie sera réalisé à l'étranger et deux tiers en France, alors que nos ventes représenteront moins de 20 % du total." M. Estève aussi tempère les inquiétudes des salariés français : "Il faudra entre dix et quinze ans avant que la Roumanie puisse développer seule un véhicule."
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