Les deux soeurs de PSA cherchent à se différencier par leur design.
Une manière de s' affirmer face à la concurrence, notamment allemande.
La C5 Airscape et la 308 RCZ incarnent ce nouvel état d'esprit.
Habituellement, Christian Streiff n'est pas homme qui doute. Mardi 4 septembre, jour de la présentation de son plan stratégique, le président du directoire de PSA bombe le torse : «Nous avons une furieuse envie de gagner. [...] Je suis 100% certain de notre succès.» Mais cinq minutes plus tard, il marque un temps d'hésitation. Il dit vouloir accentuer la différenciation entre Peugeot et Citroën. Ajoute que les voitures ne doivent pas avoir la même personnalité, que les deux marques sont génétiquement différentes. C'est là, au moment de définir leurs valeurs, que le successeur de Jean-Martin Folz flotte un peu. Il dit : «Citroën surprend, Peugeot rassure. Citroën, & est l'avant-garde et le plaisir; Peugeot, l'élégance et la robustesse.» Streiff redresse la tête pour voir l'effet produit sur son auditoire. Pas évident de conceptualiser Peugeot et Citroën. Deux marques du même groupe, deux symboles emblématiques intimement liés au patrimoine du pays.
Entre Peugeot et Citroën, rien n'a jamais été simple. Depuis 1974, date à laquelle la première reprit la seconde, les deux sociétés jouent à «je t'aime moi non plus». Fort d'une image haut de gamme et d'une forte tradition d'innovation avec la Traction Avant, la 2 CV et la DS à suspension oléopneumatique, Citroën la «colonisée» a d'abord résisté aux injonctions des Peugeot. Ce qui a menacé la fusion. Et contraint en 1982 le très actif numéro deux, Jacques Calvet, à faire le ménage dans les usines. Celui-ci, devenu président deux ans plus tard, relance la marque aux chevrons qui traînait une image ringarde. Malgré des ratés, le plus fameux étant la sortie, dans les années 1990, de deux modèles très ressemblants, la 106 et la Saxo, Citroën redevient à la mode. D'abord avec la Xsara Picasso, puis avec la série des C2, C3, C4.
Entre-temps, Jean-Martin Folz, arrivé en 1997, a mis le cap sur la croissance. Aujourd'hui, PSA figure au deuxième rang des constructeurs européens derrière Volkswagen (il pointait à la quatrième place pendant l'ère Calvet). Son chiffre d'affaires a doublé en neuf ans. L'an dernier, le groupe a vendu 1,3 million de véhicules de plus qu'en 1997, mais avec un total de 3,37 millions il reste encore loin des 4 millions fixés par Folz pour 2006. Cet objectif, Christian Streiff l'a repris à son compte pour... 2010.
Pour l'atteindre, Peugeot et Citroën travaillent sur deux axes. D'abord l'optimisation de leurs trois plates- formes. Aujourd'hui, les usines fabriquent indifféremment des Peugeot et des Citroën. Streiff veut les rendre plus flexibles et modulaires. Ce qui veut dire créer des passerelles entre les plates-formes afin de pouvoir multiplier le nombre de silhouettes (PSA prévoit 53 lance ments dans le monde d'ici à 2010). Ce travail en amont permettra aussi de mieux cibler les demandes des clients. Car on ne règle pas le moteur et les suspensions de la même manière selon que l'on privilégie la sportivité ou l'élégance.
Moins de cannibalisation
Second axe pour retrouver le chemin de la croissance, la différenciation entre les deux marques. Agé en moyenne de 48 ans, le client de Citroën est davantage féminin. Celui de Peugeot est lui plus jeune, autour de 43 ans, plus éduqué aussi. La firme aux chevrons met en avant le confort, la fluidité, le bien-être. Celle au lion évoque l'esthétisme, le dynamisme, la sûreté. Toutes deux se retrouvent sur le thème de l'innovation. «Aujourd'hui, il y a 10% des clients Peugeot qui vont vers Citroën et vice versa, et 20% qui hésitent», indique le directeur général d'Automobiles Peugeot, Frédéric Saint-Geours.
L'univers des deux marques est plutôt bien identifié. Mais PSA veut maintenant aller plus loin. «Plus l'identité de nos marques sera forte, moins il y aura de cannibalisation», indique Gilles Michel, directeur général de Citroën. En se différenciant davantage, Peugeot et Citroën veulent s'affirmer face à la concurrence. Une concurrence qui s'est intensifiée ces dernières années avec des constructeurs japonais et coréens plus menaçants, la multiplication des nouveaux véhicules, la durée de vie plus courte des modèles... «Le groupe cherche à récupérer les parts de marché que leur ont prises les constructeurs allemands, qui sont descendus en gamme», décrypte Richard Verglas, consultant au cabinet Say Partners.
Le pari de PSA n'en est pas moins périlleux. Comment Peugeot et Citroën peuvent-ils en effet accentuer leurs différences alors que leur mission de constructeur généraliste est de s'adresser au plus grand nombre ? Depuis trois mois, les deux marques planchent pour définir une charte de style. Tout l'univers de Peugeot et Citroën (couleurs, matériaux, intérieurs des véhicules, traitement du client dans les concessions...) sera passé au crible et codifié.
Le but n'est pas de créer un Yalta avec partage des zones géographiques et des segments mais, dixit Streiff, de s'adresser à 90% du marché automobile (75% aujourd'hui). En conséquence, les trous dans les gammes - par exemple l'absence de monospaces compacts chez Peugeot et de breaks C4 chez Citroën - devraient être comblés.
La future identité de PSA peut se deviner dans les concepts cars présentés au Salon de Francfort à la mi-septembre. Motorisation élevée (218 chevaux), toit à double bossage, le coupé 308 RCZ de Peugeot veut symboliser l'efficacité et l'émotion. Très élégant, le C5 Airscape de Citroën préfigure un futur cabriolet C5. Mais, au-delà du design, ces deux modèles se positionnent résolument sur le segment premium à forte marge. Un signal fort donné aux allemands. Audi, Mercedes et BMW n'ont qu'à bien se tenir.
Citroën : «Fluidité et puissance»
Son arrière-grand-père roulait en 2 CV, son grand-père fut un des premiers possesseurs de DS dans l'Yonne, et lui dirige le style de Citroën depuis un septennat. Agé de 45 ans, diplômé d'architecture, Jean- Pierre Ploué est le père de la C3 Pluriel, de la C2, de la C6 et de la C4 Picasso. Sa vocation de styliste lui est venue en assemblant des pièces de Lego. Père de quatre enfants, ce Bourguignon débute sa carrière il y a vingt ans chez Renault, où il participe au programme Twingo. Un de ses concept cars tape dans l'oeil des dirigeants d'Audi qui l'embauchent dans leur centre de design en Espagne. Jean-Pierre Ploué s'en va ensuite en Allemagne chez Ford. En quelques années, ses équipes de design passent de 97 à 180 personnes. La suite est connue. Maintenant, Jean-Pierre Ploué se réjouit de devoir accentuer la différenciation entre les deux marques. «Citroën symbolise le dauphin, dit-il. Ce sont les flancs lisses de la C4 Picasso, l'image de fluidité, de puissance, d'intelligence.»
Caractéristiques : Sa silhouette élancée crée un sentiment de dynamisme et de puissance.Matériaux Haut de gamme, à l'image du toit gainé de textile qui donne un aspect métallisé.Puissance 208 chevaux pouvant fonctionner au biodiesel.Rejet de CO2 166 g au km, soit 24 g de moins que la C5.
Peugeot : «Sensualité et harmonie»
Agé de 42 ans, ce Marseillais, père de deux enfants, a toujours dessiné des voitures. Au grand dam de ses pharmaciens de parents. Pour les rassurer, il passe le diplôme de l'Institut d'administration des entreprises en plus de celui des Arts et Métiers de l'université d'Aix-en- Provence. En 1989, Peugeot l'embauche. Sa mission : installer le numérique dans le centre de design. Six ans plus tard, il vole de ses propres ailes. Mais lorsque, en 2002, Peugeot lui propose de devenir le numéro deux du centre de design et de succéder à terme au grand manitou Gérard Welter, il plonge à nouveau. Au centre de Vélizy, il travaille sur la 207 coupé cabriolet et sur le concept car 308 RCZ. L'avenir de la firme au lion ? Jérôme Gallix, qui pousse ses stylistes à puiser leur inspiration dans les pays étrangers, ne veut pas se laisser enfermer dans les messages. Pour lui, le nouveau Peugeot, c'est «la sensualité et l'harmonie».
Caractéristiques : Une ligne ramassée qui assure au coupé un parfait aérodynamisme.Matériaux De nombreux éléments sont en aluminium, ce qui rend le véhicule plus léger.Puissance 218 chevaux.Rejet de CO2 160 g au km.
Source
Une manière de s' affirmer face à la concurrence, notamment allemande.
La C5 Airscape et la 308 RCZ incarnent ce nouvel état d'esprit.
Habituellement, Christian Streiff n'est pas homme qui doute. Mardi 4 septembre, jour de la présentation de son plan stratégique, le président du directoire de PSA bombe le torse : «Nous avons une furieuse envie de gagner. [...] Je suis 100% certain de notre succès.» Mais cinq minutes plus tard, il marque un temps d'hésitation. Il dit vouloir accentuer la différenciation entre Peugeot et Citroën. Ajoute que les voitures ne doivent pas avoir la même personnalité, que les deux marques sont génétiquement différentes. C'est là, au moment de définir leurs valeurs, que le successeur de Jean-Martin Folz flotte un peu. Il dit : «Citroën surprend, Peugeot rassure. Citroën, & est l'avant-garde et le plaisir; Peugeot, l'élégance et la robustesse.» Streiff redresse la tête pour voir l'effet produit sur son auditoire. Pas évident de conceptualiser Peugeot et Citroën. Deux marques du même groupe, deux symboles emblématiques intimement liés au patrimoine du pays.
Entre Peugeot et Citroën, rien n'a jamais été simple. Depuis 1974, date à laquelle la première reprit la seconde, les deux sociétés jouent à «je t'aime moi non plus». Fort d'une image haut de gamme et d'une forte tradition d'innovation avec la Traction Avant, la 2 CV et la DS à suspension oléopneumatique, Citroën la «colonisée» a d'abord résisté aux injonctions des Peugeot. Ce qui a menacé la fusion. Et contraint en 1982 le très actif numéro deux, Jacques Calvet, à faire le ménage dans les usines. Celui-ci, devenu président deux ans plus tard, relance la marque aux chevrons qui traînait une image ringarde. Malgré des ratés, le plus fameux étant la sortie, dans les années 1990, de deux modèles très ressemblants, la 106 et la Saxo, Citroën redevient à la mode. D'abord avec la Xsara Picasso, puis avec la série des C2, C3, C4.
Entre-temps, Jean-Martin Folz, arrivé en 1997, a mis le cap sur la croissance. Aujourd'hui, PSA figure au deuxième rang des constructeurs européens derrière Volkswagen (il pointait à la quatrième place pendant l'ère Calvet). Son chiffre d'affaires a doublé en neuf ans. L'an dernier, le groupe a vendu 1,3 million de véhicules de plus qu'en 1997, mais avec un total de 3,37 millions il reste encore loin des 4 millions fixés par Folz pour 2006. Cet objectif, Christian Streiff l'a repris à son compte pour... 2010.
Pour l'atteindre, Peugeot et Citroën travaillent sur deux axes. D'abord l'optimisation de leurs trois plates- formes. Aujourd'hui, les usines fabriquent indifféremment des Peugeot et des Citroën. Streiff veut les rendre plus flexibles et modulaires. Ce qui veut dire créer des passerelles entre les plates-formes afin de pouvoir multiplier le nombre de silhouettes (PSA prévoit 53 lance ments dans le monde d'ici à 2010). Ce travail en amont permettra aussi de mieux cibler les demandes des clients. Car on ne règle pas le moteur et les suspensions de la même manière selon que l'on privilégie la sportivité ou l'élégance.
Moins de cannibalisation
Second axe pour retrouver le chemin de la croissance, la différenciation entre les deux marques. Agé en moyenne de 48 ans, le client de Citroën est davantage féminin. Celui de Peugeot est lui plus jeune, autour de 43 ans, plus éduqué aussi. La firme aux chevrons met en avant le confort, la fluidité, le bien-être. Celle au lion évoque l'esthétisme, le dynamisme, la sûreté. Toutes deux se retrouvent sur le thème de l'innovation. «Aujourd'hui, il y a 10% des clients Peugeot qui vont vers Citroën et vice versa, et 20% qui hésitent», indique le directeur général d'Automobiles Peugeot, Frédéric Saint-Geours.
L'univers des deux marques est plutôt bien identifié. Mais PSA veut maintenant aller plus loin. «Plus l'identité de nos marques sera forte, moins il y aura de cannibalisation», indique Gilles Michel, directeur général de Citroën. En se différenciant davantage, Peugeot et Citroën veulent s'affirmer face à la concurrence. Une concurrence qui s'est intensifiée ces dernières années avec des constructeurs japonais et coréens plus menaçants, la multiplication des nouveaux véhicules, la durée de vie plus courte des modèles... «Le groupe cherche à récupérer les parts de marché que leur ont prises les constructeurs allemands, qui sont descendus en gamme», décrypte Richard Verglas, consultant au cabinet Say Partners.
Le pari de PSA n'en est pas moins périlleux. Comment Peugeot et Citroën peuvent-ils en effet accentuer leurs différences alors que leur mission de constructeur généraliste est de s'adresser au plus grand nombre ? Depuis trois mois, les deux marques planchent pour définir une charte de style. Tout l'univers de Peugeot et Citroën (couleurs, matériaux, intérieurs des véhicules, traitement du client dans les concessions...) sera passé au crible et codifié.
Le but n'est pas de créer un Yalta avec partage des zones géographiques et des segments mais, dixit Streiff, de s'adresser à 90% du marché automobile (75% aujourd'hui). En conséquence, les trous dans les gammes - par exemple l'absence de monospaces compacts chez Peugeot et de breaks C4 chez Citroën - devraient être comblés.
La future identité de PSA peut se deviner dans les concepts cars présentés au Salon de Francfort à la mi-septembre. Motorisation élevée (218 chevaux), toit à double bossage, le coupé 308 RCZ de Peugeot veut symboliser l'efficacité et l'émotion. Très élégant, le C5 Airscape de Citroën préfigure un futur cabriolet C5. Mais, au-delà du design, ces deux modèles se positionnent résolument sur le segment premium à forte marge. Un signal fort donné aux allemands. Audi, Mercedes et BMW n'ont qu'à bien se tenir.
Citroën : «Fluidité et puissance»
Son arrière-grand-père roulait en 2 CV, son grand-père fut un des premiers possesseurs de DS dans l'Yonne, et lui dirige le style de Citroën depuis un septennat. Agé de 45 ans, diplômé d'architecture, Jean- Pierre Ploué est le père de la C3 Pluriel, de la C2, de la C6 et de la C4 Picasso. Sa vocation de styliste lui est venue en assemblant des pièces de Lego. Père de quatre enfants, ce Bourguignon débute sa carrière il y a vingt ans chez Renault, où il participe au programme Twingo. Un de ses concept cars tape dans l'oeil des dirigeants d'Audi qui l'embauchent dans leur centre de design en Espagne. Jean-Pierre Ploué s'en va ensuite en Allemagne chez Ford. En quelques années, ses équipes de design passent de 97 à 180 personnes. La suite est connue. Maintenant, Jean-Pierre Ploué se réjouit de devoir accentuer la différenciation entre les deux marques. «Citroën symbolise le dauphin, dit-il. Ce sont les flancs lisses de la C4 Picasso, l'image de fluidité, de puissance, d'intelligence.»
Caractéristiques : Sa silhouette élancée crée un sentiment de dynamisme et de puissance.Matériaux Haut de gamme, à l'image du toit gainé de textile qui donne un aspect métallisé.Puissance 208 chevaux pouvant fonctionner au biodiesel.Rejet de CO2 166 g au km, soit 24 g de moins que la C5.
Peugeot : «Sensualité et harmonie»
Agé de 42 ans, ce Marseillais, père de deux enfants, a toujours dessiné des voitures. Au grand dam de ses pharmaciens de parents. Pour les rassurer, il passe le diplôme de l'Institut d'administration des entreprises en plus de celui des Arts et Métiers de l'université d'Aix-en- Provence. En 1989, Peugeot l'embauche. Sa mission : installer le numérique dans le centre de design. Six ans plus tard, il vole de ses propres ailes. Mais lorsque, en 2002, Peugeot lui propose de devenir le numéro deux du centre de design et de succéder à terme au grand manitou Gérard Welter, il plonge à nouveau. Au centre de Vélizy, il travaille sur la 207 coupé cabriolet et sur le concept car 308 RCZ. L'avenir de la firme au lion ? Jérôme Gallix, qui pousse ses stylistes à puiser leur inspiration dans les pays étrangers, ne veut pas se laisser enfermer dans les messages. Pour lui, le nouveau Peugeot, c'est «la sensualité et l'harmonie».
Caractéristiques : Une ligne ramassée qui assure au coupé un parfait aérodynamisme.Matériaux De nombreux éléments sont en aluminium, ce qui rend le véhicule plus léger.Puissance 218 chevaux.Rejet de CO2 160 g au km.
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