PSA a changé de braquet avec C TAVARES, car depuis 2014 on assiste à une internationalisation au "pas de course" : Maroc en 2015 (Usine de Kenitra), Iran en 2016 (2 JV avec Iran-Khodro/PEUGEOT et Saipa/CITROEN) et désormais le retour en Inde qui semble se profiler à moyen terme.
Il faut attendre la conférence de mercredi prochain pour avoir des informations concrètes sur ce nouveau projet.
On peut déjà identifier plusieurs questions :
1/ PSA semble avoir privilégié un accord de coopération assez similaire à ceux noués avec DFM pour la Chine et ses 2 nouvelles JV iraniennes (Iran Khodro et Saipa) : la presse évoque le groupe familial CK BIRLA, acteur industriel historique en Inde avec pour l'automobile sa marque "Ambassador".
Yann VINCENT, Directeur Industriel de PSA Groupe, a précisé en novembre dernier que le groupe "testait un certain nombre de partenaires pour l'Inde et l'ASEAN, car le choix du partenaire est un point essentiel" (Usine Nouvelle).
On verra si ce retour en Inde s'effectuera en une seule étape ou en plusieurs avec un autre industriel du secteur auto plus connu (TATA, MAHINDRA, etc...)
Ce type de partenariat permet :
- de partager les investissements en CAPEX : il semble que le partenaire indien pourrait mettre à disposition une usine située à Chennai ex-Madras (Inde du Sud), dont les capacités de production restent modestes (12.000 véhicules/an). A noter que plusieurs entreprises françaises du secteur auto sont présentes dans la région de Madras : Renault, Michelin, Valéo... ;
- de bénéficier d'une connaissance plus fine des spécificités administratives, juridiques, financières et fiscales du pays, ce qui est loin d'être négligeable dans des mondes si différents pour s'implanter industriellement et commercialement,
Au passif, ces accords, souvent imposés par les autorités gouvernementales, permettent d'organiser des transferts de technologie au profit des constructeurs locaux, malgré la perception de royalties. Et les résultats bénéficiaires (comme les déficits) sont à partager avec le partenaire...La recherche de rentabilité est donc une préoccupation quotidienne avec ces JV.
2/ Quel sera le niveau d'investissement de PSA en Inde ?
En 2011, lors du précédent projet d'implantation en Inde, l'investissement avait été évalué à 650 millions d'euros.
Même si les autorités indiennes ont mis en place le programme "Make in India" avec différentes incitations fiscales et financières à destination des investisseurs étrangers afin de créer plusieurs corridors industriels, PSA sera certainement prudent pour son retour : il est inconnu dans le pays, il ne dispose d'aucun réseau commercial et le marché indien est très difficile.
La quasi-éviction de PSA de Russie, malgré la présence d'une usine de 120.000 véhicules avec les conséquences en résultant, milite pour un projet assez prudent au départ, ou à tout le moins évolutif avec le temps.
A titre de comparaison, l'implantation de l'usine Renault-Nissan à Chennai en 2010 a représenté un investissement de 650 millions d'euros, avec 2 chaines de montage d'une capacité globale de 400.000 véhicules/an, et 7.000 salariés. L'investissement de PSA pour l'usine marocaine de Kenitra est supérieur à 500 millions d'euros...
Le Plan "Push to Pass" a fixé comme objectif d'augmenter les ventes dans la zone INDE/PACIFIQUE de 50% d'ici 2021 : à ce jour, les ventes de PSA Groupe s'établissent à 20.000 unités à peine en 2016. Les objectifs restent donc mesurés, sauf redéfinition de ceux-ci...
3/ Quels véhicules seront produits en Inde par PSA Groupe ?
C'est une des questions les plus délicates pour la Direction du groupe, car le marché indien est dominé essentiellement par de petits véhicules, avec des volumes qui restent faibles par rapport à la population du pays (marché à +/- 3 millions de véhicules/an pour 1,28 milliards d'habitants), et les conséquences en terme de rentabilité en découlant. On pourra d'ailleurs noter que de grands constructeurs mondiaux sont présents en Inde, mais ne sont pas parvenus à s'y imposer véritablement.
La classe moyenne indienne va t-elle adopter le même comportement que les chinois et s'orienter vers des véhicules plus imposants et plus qualitatifs ?
A ce jour, les volumes sont assurés par de petits véhicules accessibles en prix proposés par des marques d'entrée de gamme.
PSA devra arbitrer entre véhicules à forte marge mais aux volumes limités et des véhicules populaires accessibles à plus grande échelle.
PSA a sans doute une carte à jouer en Inde, car il dispose d'une expertise certaine en matière de petits véhicules habitables et homogènes ; il lui reste à trouver la bonne formule et les bons modèles à industrialiser.