La voiture électrique sur des grands trajets : notre test avec le nouveau Peugeot e-2008

Agréable en usage quotidien, la voiture électrique continue d’alimenter les craintes des utilisateurs novices sur sa capacité à tenir la cadence sur les longs trajets. Autonomie, solutions de charge en itinérance, ou encore temps supplémentaire de route sont autant de sujets qui nous sont régulièrement remontés comme des points de blocage pour une transition énergétique.

Test avec le nouveau Peugeot e-2008

Afin de pouvoir reprendre ces points et peut-être démystifier certains aspects de la voiture électrique, nous avons profité de quelques jours de libre afin de réaliser un petit périple entre région parisienne et Bourgogne avec le nouveau Peugeot e-2008 GT, équipé de la chaîne de traction de 156 chevaux, que nous avons découvert l’été dernier. L’occasion dans le même temps de reprendre le volant du SUV compact de la marque, sur environ 1000km, majoritairement autoroutier.

Un départ en week-end préparé sur un coup de tête

Avant de rentrer dans le détail, quelques mots sur notre voyage, qui va nous faire parcourir à l’aller un peu plus de 400 kilomètres, principalement sur l’autoroute A6, pour rallier Senlis, dans l’Oise, aux environs de Dole, dans le Jura.

Nouveau Peugeot e-2008

Afin de rajouter un peu de challenge au voyage, nous prenons la décision de partir un mercredi en fin d’après-midi, correspondant à l’heure de pointe en région parisienne, ce qui impliquera donc un parcours particulièrement rallongé en raison d’un trafic chargé calculé par le système de navigation : au lieu de traverser Paris par le périphérique, qui est le trajet le plus court, nous devons contourner et passer par l’agglomération de Meaux, ce qui rajoute quelques kilomètres et un peu de temps.

L’autonomie théorique de notre Peugeot e-2008, équipé des jantes 18 pouces optionnelles, étant de 402 kilomètres, nous devrons impérativement donc recharger sur la route. Et histoire de pimenter le tout, nous partons avec seulement 77% de batterie, ce qui correspond alors à une autonomie théorique affichée de 304 kilomètres. C’est donc certain, nous devrons nous arrêter, d’autant plus que nous comptons rouler à la vitesse maximale autorisée, donc 130km/h.

Le réseau de recharge étant en France désormais plutôt bien maillé, notamment sur l’autoroute, nous décidons de partir sans réellement planifier le trajet à l’avance. Nous ne prévoyons pas non plus d’utiliser de carte de recharge, nous comptons plutôt sur les applications des opérateurs, les QR Code présents sur les bornes, ou si disponible, notre carte bancaire directement. Pour la navigation, nous utilisons celle embarquée dans le Peugeot i-Connect Advanced, donc pas de surprise particulière : l’info-trafic est plutôt efficace, mais l’absence d’adaptation à l’électrique la rend obsolète sur les longs trajets. Autre point désagréable concernant la navigation, nous ne pouvions pas l’afficher dans le combiné 3D, ce qui, honnêtement, réduit l’intérêt d’un tableau de bord totalement digital.

La première partie du trajet s’effectue sans encombre particulière, la N330 jusqu’à l’A4 étant plutôt calme pour un mercredi soir. Nous atteindrons rapidement le péage de Saint-Germain-Laxis, sur l’A5, à proximité du château de Vaux-Le-Vicomte. Il ne nous reste plus que 50% de batterie, de quoi faire une petite centaine de kilomètres. Et c’est ce que nous ferons, puisque nous arriverons à la première station de recharge 102 kilomètres plus loin, chez Ionity, à l’aire de la Réserve sur l’A6. Le combiné affiche alors 8% de charge de batterie. Une station que nous connaissons pour s’y être déjà arrêté. Sur place, nous trouvons une station composée de 6 bornes ABB acceptant une puissance de charge allant jusqu’à 350kW, bien suffisant pour notre Peugeot e-2008 qui n’acceptera pas plus de 100kW. Petit point positif, les bornes sont partiellement abritées avec un petit auvent au-dessus de chacune d’elle, ce qui permet de lancer une charge sans être trempé s’il pleut.

Test avec le nouveau Peugeot e-2008

La station étant déserte à notre arrivée, nous avons le luxe de pouvoir choisir notre place. Pour cette charge, nous utilisons l’application Ionity, qui est assez simple à utiliser. Une fois connecté, il suffit de sélectionner la fiche de la station puis le chargeur numéroté (pas de panique, l’application propose la géolocalisation et les numéros des bornes sont inscrits sur celles-ci), ou bien d’appuyer sur le bouton en forme de QR Code pour scanner l’image présente sur la borne. Nous choisissons la première solution, et après avoir validé le paiement par carte bancaire, la charge démarre quelques secondes après avoir branché le câble Combo-CCS à la voiture.

Un aperçu de la courbe de charge de notre Peugeot e-2008

Nous sommes donc partis pour une charge qui durera 35 minutes, nous permettant de recharger 43.3kWh (avec une perte d’énergie de seulement 7,5%), et repartir avec 87% de capacité. Nous avons attendu quelques minutes de plus, la courbe de charge de notre Peugeot e-2008 n’étant pas si mauvaise, le chargeur remplissant encore la batterie à une puissance de 48kW lorsque nous avons débranché. Le tout pour un coût total de 24,86€, soit 0,59€ le kWh.

Nous repartons pour environ 130km, où nous décidons de faire une seconde pause, arrivé à 22% de charge. Plus qu’une nécessité pour la voiture, nous décidons de nous arrêter avant tout pour manger un morceau, vu l’heure tardive. Escale donc à l’aire du Chien Blanc. Beaucoup plus vaste que la précédente, cette aire de service héberge l’opérateur e-Vadea, moins connu que Ionity, et contrôlé par l’énergéticien SPIE. Une fois arrivés sur place, la surprise est plutôt bonne. Bien qu’éloignée des services de restauration, la station est entièrement abritée, propose le paiement direct par carte bancaire, et surtout, un totem de prix est installé devant, comme dans une station-service thermique. Dommage que les prix soient plutôt élevés compte-tenu de la puissance modeste de la station (0,48€ le kWh sur la borne 50kW, 0,624€ sur les bornes 150kW). Et là encore, nous sommes bien seuls. Comme précédemment, nous lançons la charge en quelques secondes à partir de l’application de l’opérateur, qui a un fonctionnement similaire.

Etant donné que la raison principale de l’arrêt n’est pas la recharge de la voiture, nous utilisons la borne 50kW, moins onéreuse. Nous restons 15 petites minutes, le temps d’avaler un sandwich, ce qui nous permet en même temps de récupérer 14,5kWh dans la batterie, permettant de récupérer la moitié de la capacité de la batterie, pour un coût de 6,98€. Car le voyage en électrique, c’est aussi la possibilité de faire autre chose pendant le ravitaillement de la voiture, ce qui relativise souvent la durée des pauses et mutualise ce temps.

Nouveaux feux arière Peugeot e-2008

Cette seconde charge nous permettra d’atteindre notre destination très sereinement, avec une charge à l’arrivée de 19%. La consommation globale sur nos 405km sera d’un peu plus de 18kWh/100km, grâce à la partie du trajet sur des routes nationales, pour un coût total de charge sur le trajet de 31,84€, correspondant à un coût global estimé de 9,60€/100km (incluant la charge initiale à 0,20€ le kWh). Un coût donc plutôt raisonnable, à comparer à un Peugeot 2008 PureTech 130 EAT8 équivalent qui coûterait environ 13,80€/100km, et équivalent à un Peugeot 2008 BlueHDi 130 EAT8 qui demanderait plutôt 9,35€/100km.

Seule contrepartie de l’électrique, un temps de trajet qui sera donc rallongé d’environ 50 minutes pour les recharges. Mais, si l’on tient compte que nous aurions du quoi qu’il arrive faire au moins une pause de 20 minutes à mi-parcours, sans forcément faire le plein, cela ramène le temps supplémentaire à seulement 30 minutes.

Un trajet retour assisté par free2move

Pour le trajet retour, nous changeons de stratégie dans notre planification de trajet, en utilisant l’application e-Routes, éditée par free2move Charge. Pour rappel, cette application de navigation embarque un planificateur de trajet connecté au véhicule, palliant l’absence de solution embarquée dans l’écran tactile. Assez simple d’utilisation, elle propose des paramétrages assez simples, comme le choix exclusif ou l’exclusion de réseaux de charge du calcul d’itinéraire, la prise en compte de vos badges de recharge si vous les utilisez, la stratégie globale du parcours (moins d’arrêts mais plus longs, plus d’arrêts mais plus courts par exemple), la stratégie concernant la batterie (pourcentage minimal à l’arrivée en station et à destination, la capacité maximale à recharger) ou encore des paramétrages simples liés au parcours (sans péage, vitesse maximale etc.). Pour faciliter l’utilisation en roulage, elle propose la duplication via Android Auto ou Apple CarPlay, adapte le trajet en fonction du trafic et alerte à l’approche des zones de danger (appelées zones de sécurité).

Une solution globalement moins complète qu’ABRP qui permet énormément de paramétrages et de reporting pour les plus aguerris, mais qui est nettement plus simple à utiliser pour un public lambda, et aussi un peu moins chère. Car si ABRP possède une version gratuite, elle ne permet pas des fonctionnalités pourtant essentielles comme Android Auto ou le trafic en temps réel, sans payer un abonnement de 4,99€/mois ou 49,99€/an. E-Routes quant à elle, est offerte pendant 6 mois puis proposée à 4€/mois ou 40€/an. L’application est également incluse dans le Pack Connect Plus, incluant notamment les commandes à distance très utiles, à 8€/mois ou 80€/an.

L’itinéraire proposé par l’application

Batterie chargée à 100%, paramétrée pour faire le moins d’arrêts possibles et arrêt à 10% de charge, l’application nous propose un trajet qui nous semble cohérent, avec une seule recharge, prévue à la station TotalEnergies située sur l’A6, aire de la Couline. Charge prévue : 10-85% en 41 minutes, pour un coût prévisionnel de 22,06€. Après tout pourquoi pas.

Nous prenons donc la route en utilisant l’application comme navigateur via Android Auto. Avec l’affichage en plein écran, le rendu est assez proche de la navigation embarquée, seuls les graphismes sont différents. 4 principaux blocs sont affichés sur chaque coin de l’écran :

  • La prochaine direction en haut à gauche
  • L’heure d’arrivée, le temps restant et les kilomètres jusqu’à la prochaine station de charge restants en bas à gauche
  • L’état de charge batterie en haut à droite
  • Les informations sur la station de charge prévue (puissance, disponibilité, charge prévue à l’arrivée) en bas à droite

Le premier point remarqué est que l’application semble beaucoup solliciter le smartphone, bien qu’il recharge par induction pendant tout le trajet. Résultat, le téléphone a tendance à chauffer, et il rend impossible la charge au bout de 3 heures de route. En l’absence d’optimisation future de la part de free2move Charge, il vaudra mieux prévoir un chargement par câble. Autre point agaçant, les consignes de navigation qui sont énoncées sur le même canal que la radio ou le média écouté, rendant le tout inaudible. Gageons que des mises à jour, qui semblent régulières, corrigent le problème.

Au fur et à mesure de notre trajet, nous avons tendance à trouver l’application particulièrement pessimiste, si tant est qu’elle finit par nous recommander de rouler à 110km/h plutôt qu’à 130. Probablement une conséquence de la surconsommation d’électricité due à la traversée de l’Auxois, sur les hauteurs de Beaune, se traduisant par une consommation sur la première partie de parcours de 22,5kWh/100km. Etant quelque peu têtus, et voulant pousser la voiture comme l’application dans leurs retranchements, nous décidons de conserver notre allure normale pour voir le comportement futur du planificateur. Qui finira par arriver puisqu’il nous proposera d’aller recharger finalement à une station Bump à l’entrée d’Auxerre, 30 kilomètres plus tôt que prévu. Un choix par ailleurs surprenant, une station Engie étant sur le chemin sans quitter l’autoroute, et cette petite station Bump étant à 100 mètres d’une station Tesla bien plus grosse et fiable. Qu’à cela ne tienne, nous décidons tout de même de rallier l’aire de la Couline. Restant sur l’autoroute, l’application comprend vite que nous ne la suivons pas et recalcule assez rapidement le trajet, pour nous reproposer la station initiale. Arrivée prévue avec 3% de charge. Beaucoup plus tendu que l’aller quelques jours auparavant. Afin d’éviter tout de même la panne sèche sur l’autoroute, nous réduisons notre vitesse sur les 10 derniers kilomètres, profitant par ailleurs d’une zone de travaux. Arrivée finale à la station avec 2% de charge après 220 kilomètres de route et plus aucune indication sur l’autonomie restante. L’application n’était peut-être pas si pessimiste finalement.

Nous découvrons donc cette fameuse station TotalEnergies. Si elle est bien équipée (auvent, plusieurs types de puissance disponibles et Total oblige, des petits services additionnels comme une raclette à pare-brise par exemple), elle n’est pas très optimisée. La mini-borne pour payer par carte bleue ne fonctionnait pas, et certaines bornes ne semblaient pas être adaptées à la station, en proposant 2 câbles pour une seule place. Résultat, 1 câble est indiqué hors service ce qui peut s’avérer confusant à l’arrivée. Heureusement, l’affluence est faible ce qui nous permet de prendre notre temps.

Pour la recharge, nous suivons les préconisations de l’application e-Routes, qui nous propose de recharger jusqu’à 88%. N’ayant pas l’application installée sur notre smartphone, nous décidons d’utiliser le QR Code sur la borne. Cela redirige vers une page internet qui permet de payer puis de suivre la charge. Là encore, rien de très compliqué si ce n’est qu’avec cette solution, il faudra saisir à chaque fois les informations de la carte. La charge se déroule sans encombre, et nous décrochons le câble au bout de 35 minutes, en ayant rechargé 44kWh. Le reste du trajet se déroule sans encombre, et nous arrivons à notre destination à l’heure prévue par e-Routes, avec 12% de batterie comme prévu.

La charge nous aura coûté 26,01€, soit un coût au kWh de 0,59€, comme chez Ionity. Avec également pour conséquence un coût global légèrement plus faible qu’à l’aller de 8,80€/100km. Un coût plus faible qui s’explique par le fait que nous soyons partis cette fois batterie pleine, la charge domestique coûtant beaucoup moins cher. Et seulement 35 minutes de plus, soit 15 minutes en comptant la pause réglementaire. Pas un énorme sacrifice.

Conclusion, une électrique peut-elle faire de longs trajets ? Bien sûr, et même plus sereinement que ce que l’on croit

Bien entendu, les conditions de route en électrique sur long trajets se sont considérablement améliorées depuis 2 ans, rendant les week-ends spontanés plus faciles. Par ailleurs, les grands axes et les agglomérations commencent à être très bien maillés en stations de charge rapide aujourd’hui (si ce sujet vous intéresse, n’hésitez pas à aller consulter cette carte des stations de charge rapide très complète). Et vu notre expérience, les longues files d’attente aux stations de charge semblent plutôt relever de l’exceptionnel voire du fantasme. Il est donc de plus en plus compliqué de lire aujourd’hui des articles de presse généraliste décrivant le moindre long trajet en électrique comme un cauchemar.

Bien entendu, tout n’est pas parfait, et voyager en électrique demande malgré tout un peu moins de spontanéité qu’en thermique. Pour les néophytes, les possibilités de charge (via QR Code, badge, application opérateur, ou paiement direct par carte bancaire), assorties d’abonnements divers et variés faisant varier les prix parfois du simple au double, peuvent vite embrouiller l’esprit. Pour autant, rappelons que pour la plupart de ces solutions, une fois les réglages initiaux effectués (typiquement, créer des comptes et renseigner IBAN ou carte bancaire), ces opérations ne sont plus à refaire et permettent de gagner un temps précieux une fois devant la borne. Une question d’habitude à changer en résumé, et l’obligation d’installer des terminaux de paiement sur les bornes, y compris chez Tesla, va contribuer à simplifier tout ça.

Nouveau e-2008 156ch

Concernant la partie navigation, il nous semble dommage que Peugeot multiplie les solutions en fonction des modèles. Pour l’instant, seuls les tous nouveaux Peugeot e-3008 et e-5008 ont droit au planificateur embarqué, laissant tous les autres modèles sans autre solution que e-Routes, que vous ayez ou non la navigation embarquée. De fait, cela a tendance à rendre la navigation embarquée peu utile, d’autant plus qu’e-Routes est moins onéreuse que le Peugeot i-Connect Advanced. L’application en elle-même offre de belles promesses, et à l’utilisation nous a semblé assez cohérente dans ses choix. Cependant, il reste quelques bugs à résoudre et il faudra continuer à proposer des mises à jour régulièrement pour améliorer la stabilité générale, la connexion avec le véhicule et toujours affiner les calculs.

Et bien sûr, les voitures elles-mêmes vont continuer de s’améliorer, bien que nous atteignions déjà des bonnes prestations, comme sur ce Peugeot e-2008 GT qui offre une autonomie de 400km le rendant plus polyvalent, même si sa silhouette le laisse un peu moins efficient que peut l’être une Peugeot e-308, que nous avons également testée sur le même parcours et dont vous retrouverez notre essai très prochainement. Nous reprendrons également dès le mois de juin le volant du nouveau Peugeot e-3008, ce qui sera l’occasion de confronter son planificateur embarqué à la réalité. Donc restez connectés !